Hommage à Daniel Cordier

et Jean Moulin

A l'heure de l'anniversaire de la libération de Paris du 25 août 1944, c'est un hommage à Jean Moulin par Daniel Cordier que nous avons choisi d'évoquer aujourd'hui. "La victoire en pleurant" publié en juin dernier chez Gallimard, est l'ouvrage posthume du secrétaire du chef de la Résistance dans la France de la Seconde Guerre mondiale. L'historienne Bénédicte Vergez-Chaignon, spécialiste de la période, auteure de plusieurs biographies sur Pétain et Jean Moulin en assure la préface, l'édition et les annotations. Un ouvrage qui retrace la période 1943/1946 et fait suite à Alias Caracalla, publié en 2009 puis porté au petit-écran.

"Je suis triste dans ma solitude car, depuis des mois, je pense à ce retour comme à une fête où tout le monde parle à tout le monde, dans les rires, parfois brisés par les larmes des absents.", confie Daniel Cordier à son retour dans le Paris libéré d'octobre 1944. Car c'est de Londres qu'il apprit la délivrance de la capitale. A son arrivée, il se sent plus seul qu'outre-Manche, tous ses contacts de la Résistance ayant exercé sous de fausses identités: "Que sont-ils devenus ? Comment les retrouver ?" interroge-t-il dans ses Mémoires.

Il croise, au hasard d'une rue, Jean-Paul Sartre qu'il voudrait serrer dans ses bras. En quatre ans de guerre secrète, le jeune Daniel Cordier  qui avait décidé, à 20 ans, de rejoindre la résistance naissante du Général de Gaulle à Londres a changé et cherche ses marques. Celui qui voulait se battre avait été parachuté comme opérateur radio avant d'être choisi comme secrétaire par Rex. Il n'apprit que très tardivement et par hasard qu'il s'agissait de Jean Moulin.

 

C'est après l'arrestation de Jean Moulin à Caluire-et-Cuire près de Lyon, que débute son ouvrage de Mémoires. Nous sommes au lendemain  du coup de filet de la Gestapo, le 22 juin 1943. Alors à Paris, Daniel Cordier, alias Alain, apprend de la bouche de l'un de ses camarades, sur un quai de la station Châtelet: "Le patron..." Il écrit: "Avant qu'il ne prononce le deuxième mot, j'ai compris "Arrêté !"

Lors de cette entrevue de Caluire où se rencontraient des membres du Conseil National de la Résistance,  c'est une dénonciation, toujours non clairement élucidée, qui généra l'arrestation de Jean Moulin et d'autres participants à la réunion. Sous le choc de la nouvelle, le premier réflexe de Daniel Cordier fut la volonté de tout tenter pour trouver une solution d'évasion. Une évidence qu'il saisit très vite impossible. La Résistance doit se poursuivre.

1943 est une période où l'étau continue de se resserrer avec des arrestations qui se multiplient. C'est cet après, toujours plus douloureux que Daniel Cordier raconte, de façon très détaillée, dans son ouvrage. La vie d'après, sans Rex, où il faut continuer tout en conservant l'espoir de le retrouver vivant. Il avancera dans des missions de services secrets avant de les quitter en janvier 1946.

"Ce premier jour de ma liberté, je l'ai vécu sans projet et surtout sans avenir", écrit-il dans son ouvrage. Une libération au coeur d'une victoire... en pleurant. Une liberté reconquise qu'il faudra recontruire après cinq ans de combat... la Mémoire en tête qu'il n'aura jamais cessé de porter.

Marie-Hélène Abrond

Publié le 25 août 2021

 

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