Juliette Binoche, féminine et féministe !
C'est une comédie sociale que nous avions vue juste avant le confinement et qui vient de ressortir sur les écrans. "La Bonne Epouse", le film signé Martin Provost et incarné, dans le rôle-titre par Juliette Binoche est le reflet doux-amer d'une société révolue... qui évolue à toute vitesse, juste avant mai 68 au sein d'une école ménagère... lieu destiné à faire des jeunes filles de bonnes épouses pour leur futur mari. Un film choral avec François Berléand, Yolande Moreau, Noémie Lvovsky et Edouard Baer.
Plantons le décor pour mieux saisir le contexte du film ! Le concept d'"écoles ménagères" est né en 1873 avant qu'un enseignement dit "ménager" ne soit intégré au sein des écoles primaires en 1882. A l'époque, Jules Ferry avait créé l'enseignement obligatoire, laïc et gratuit, une grande avancée sociale dans la mesure où, à l'origine, seule une part infime de la société avait accès à l'enseignement et prioritairement la gent masculine. Lire, écrire, compter était bien l'objectif de base auquel s'ajoutait l'intégration de rudiments plus pratiques pour les filles. Les écoles ménagères, elles, assuraient une formation des bonnes pratiques et tout ce qui était utile pour être "femme et mère au foyer". Mais dans les années 50 puis 60, les deux guerres mondiales étaient passées par là. Les femmes avaient remplacé les hommes au travail dans les usines et les champs pour pallier leur absence et avaient dû prendre les rênes du foyer. La société évoluait; les femmes obtenant le droit de vote en 1944 avec, en 1965 la possibilité de travailler sans autorisation du conjoint et ouvrir un compte bancaire.
C'est précisément ce moment de basculement auquel nous assistons dans le film incarné par Juliette Binoche. Alors que la société commence à se disloquer, l'école ménagère Van der Beck accueille ses nouvelles élèves avec le projet unique d'apprendre aux jeunes filles l'art de devenir de futures maîtresses de maison accomplies.
Paulette (Juliette Binoche) enseigne, Robert (François Berléand) dirige. Tout repose sur les sept piliers, préceptes immuables assénés le jour de la rentrée: "la Bonne Epouse", c'est, entre autres... la compagne de son mari, compréhensive et toujours de bonne humeur, la trésorière du foyer et non la dépensière, la première levée, la dernièe couchée...
Pas question d'enseigner à penser par soi-même mais bien de connaître tous les rudiments nécessaires pour créer un futur foyer heureux dans lequel l'époux s'épanouira: cuisine, lavage, repassage, couture, soin des enfants. Sauf que...
Les filles écoutent se cachent en écoutant Ménie Grégoire à la radio qui prodigue des conseils qui ne sont pas du goût de Soeur Marie-Thérèse (Noémie Lvovsky) veillant à la santé morale de sa jeune tribu dont Annie Fuchs (Marie Zabukovec) est jugée la plus rebelle. Gilberte (Yolande Moreau), soeur du directeur est chargée d'apprendre les rudiments de la bonne cuisine.
Dans cette micro-société très organisée, la disparition de Robert qui n'a laissé... que des dettes est un séisme. Les femmes de la maison vont se trouver obligées de réagir face au gouffre qui les attend. Paulette reprend les rênes de l'école et de sa vie avec André (Edouard Baer) retrouvé par hasard.
On ne vous racontera pas la fin de cette histoire, ni la joyeuse montée vers Paris, à la caricature symbolique. Ne boudez pas votre plaisir. Courez voir "La Bonne Epouse", un film très féminin qui vous fera sourire et qui s'adresse aussi aux hommes !
Marie-Hélène Abrond
Publié le 2 juillet 2020
ph.Carole Bethuel.
Ajouter un commentaire