Marion Pouvreau, l'humour en tête !

Seule en scène, Marion Pouvreau manie le Verbe et l'humour avec talent "A la Folie Théâtre" à Paris et en tournée, sur un sujet qui réunit jeunes et moins jeunes. "Mais t'as quel âge ?!"est un spectacle  intergénérationnel. Thème fédérateur, la question de l'âge a inspiré l'humoriste qui fait salle comble ! La malice dans la voix, la comédienne qui a obtenu le prix du meilleur espoir au Festival off d'Avignon l'an dernier, a accepté le jeu du questions/réponses.

Comment est née l'idée de votre spectacle ?

Mon premier seul en scène "On m'a parlé de vous" partait de théories sociologiques. Parmi elles, je parlais déjà des comportements des générations, les unes avec les autres. Pour différencier les âges sur le ton de l'humour, j'utilisais des plats type Tupperware, comme dans une cuisine, du plus grand au plus petit Cela durait 10 minutes et  générait une ambiance incroyable. Je me suis dit que ce sujet méritait plus de temps et qu'il fallait en faire un spectacle entier. Cela tombait juste au moment où je passais le cap de la trentaine, cet instant où on vous fait comprendre qu'il serait temps d'avoir des enfants mais aussi une période où les parents vieillissent et les grands-parents disparaissent. Je suis une grande nostalgique du temps qui passe. L'écrire sous une forme humoristique aide à passer ces étapes.

Le langage est au coeur de votre spectacle. Est-il selon vous, un marqueur de génération ?

Absolument. Les expressions, plus ou moins anciennes qu'on emploie souvent mal aujourd'hui, parce qu'on n'en connait plus forcément le sens, marquent les époques. A l'opposé, on trouve le langage "jeune" des 20 ans et moins. J'avoue que je me renseigne pour savoir la façon dont cette génération parle. Ce langage  permet aussi aux plus jeunes de ne pas être compris par les plus âgés et d'être dans leur communauté. J'en ai appelé plusieurs lorsque j'ai écrit le spectacle. Et comme cela évolue très vite, je me mets à jour régulièrement !  

Vous incarnez cinq personnages sur scène. Pouvez-vous m'en dire un peu plus sur cette famille ?

Le personnage central, la trentaine, comme par hasard, c'est Emilie à qui tout le monde met la pression pour fonder une famille.  Autour d'elle, son père Alain, un baby boomer, à la limite de la retraite qu'on lui repousse au fil des années. Juliette la cousine d'Emilie représente la génération Z, c'est à dire la vingtaine avec un langage très jeune et un caractère bien trempé. Nathalie, la mère de Juliette a la quarantaine. Et Papy Jean, lui, incarne la génération dite silencieuse, née avant 1945 mais qui a toujours de belles histoires à raconter, en fin de repas. Tous ces personnages, je les retrouve dans les spectateurs qui viennent me voir souvent en famille. J'ai beaucoup de chance. Les gens me disent en discuter pendant des heures, une fois rentrés chez eux,  en s'appelant par les prénoms de mes héros. Et puis, en fonction de mon public, j'adapte le spectacle qui est toujours un peu différent et évolutif !

Les objets  utilisés par les différentes générations sont-ils, selon vous,  un autre marqueur d'âge ?

Tout à fait. J'évoque le Polaroïd même s'il est à nouveau produit  mais aussi les liens avec les nouvelles technologies comme les smartphones grand écran destinés aux plus âgés.  C'est assez fou quand on y pense ! Même chose pour les réseaux sociaux quand Papy Jean demande l'avis sur Facebook et que la plus jeune de la famille lui répond que c'est démodé !

Parlez-moi un peu de vous. Vous êtes une ancienne timide ? 

C'est vrai. Mes parents me disaient: "Va faire du théâtre, ça va t'aider". Je leur répondais: "Non, c'est un truc de vieux !". Et à 15 ans, quand ils ont arrêté de me le dire, je me suis inscrite au théâtre. En fait, je n'aime pas qu'on me marche sur les pieds, je dis ce que je pense mais je suis très différente en fonction des gens avec lesquels je me trouve. Avec ceux que je connais, je crois que je prends de la place et avec les autres, je suis plus réservée. Le théâtre, c'est la scène, on n'a plus le choix ! La timidité ne doit pas laisser de trace mais le caractère réservé permet d'observer. Mon seul en scène, c'est de l'humour d'observation ! Tout ce que je raconte est vrai ! 018 format web

Autre lieu d'observation, votre vie d'avant, vécue en entreprise ?

L'univers de l'entreprise fait se côtoyer toutes les générations: du jeune stagiaire qui reste pendant trois jours à ceux qui y travaillent six mois ou encore des personnes présentes depuis de nombreuses années ainsi que ceux qui vont partir à la retraite... C'est un panel extraordinaire à observer. Avoir exercé dans une entreprise à la pointe de l'innovation  m'a inspirée !

Vieillir, est-ce plus difficile pour les femmes que pour les hommes ?

Oui, je le pense mais cette différence se réduit. Je trouve qu'on est moins présents dans les diktats de la beauté, des vêtements. Le naturel est de plus en plus important. Cela signifie aussi qu'on accepte peu à peu de voir des rides, un corps qui vieillit. Même si c'est loin d'être parfait, cela va dans le bon sens !

Quelle serait la recette, selon vous, pour rester jeune ou être bien dans son âge ?

Je préfère l'idée "bien dans son âge" car c'est, au fond, accepter, vivre le second degré en osant utiliser, par exemple, des expressions vieillottes et...  d'assumer. Bien vieillir, c'est accepter d'être un peu décalé, d'avoir des choses qui peuvent surprendre les autres générations et ne pas essayer de copier ou ressembler à une personne de 20 ans. Sinon, cela sonne faux !

Les jeudis  A La Folie Théâtre jusqu'au 28 avril et en tournée.

Marie-Hélène Abrond

Publié le 12 janvier 2022

Photos Fabienne Rappeneau

 

 

 

 

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